Paris, le 25 février 2015

 

Communiqué de presse

 

VIH et tuberculose : Une remise en question des schémas actuels de prise en charge et de prévention

 

En Côte d’Ivoire, chez des adultes infectés par le VIH, l’administration d’un traitement antirétroviral précoce accompagné d’un traitement préventif de la tuberculose de 6 mois permet de diminuer significativement le risque de morbidité sévère. C’est ce que démontrent les résultats finaux de l’essai ANRS 12136 Temprano qui font l’objet d’une présentation orale lors de la 22ème Conférence sur les rétrovirus et les infections opportunistes (CROI 2015) à Seattle le 25 février 2015.

 

L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) recommande depuis 2013 que les adultes infectés par le VIH vivant dans les pays à ressources limitées puissent démarrer un traitement antirétroviral (ARV) lorsque le nombre de CD4 est inférieur ou égal à 500 cellules/mm3. Par ailleurs, pour lutter contre la tuberculose, maladie opportuniste du VIH la plus fréquente dans les pays du Sud, l’OMS recommande l'usage préventif, pendant 6 mois, d’un médicament d’accès facile, l'isoniazide (INH). Cette dernière intervention n’est cependant pas appliquée dans de nombreux pays, dont la Côte d’Ivoire, qui craint qu’elle favorise une émergence de bacilles résistants. Ces recommandations doivent être aujourd'hui rediscutées au vu des résultats de l'essai ANRS 12136 Temprano qui sont présentés en communication orale à la 22ème Conférence sur les rétrovirus et les infections opportunistes (CROI 2015) le 25 Février 2015.

 

L’essai  ANRS 12136 Temprano  a été mené par les chercheurs du site ANRS de Côte d’Ivoire, qui rassemble des équipes de l’Inserm (U897, Université de Bordeaux), du Service des Maladies Infectieuses et Tropicales du CHU de Treichville et de 8 autres centres de prise en charge de l’infection à Abidjan. Cet essai dont l'ANRS (France REcherche Nord&sud Sida-hiv Hépatites) est  le promoteur et le principal financeur, a été conduit au sein de neuf centres de soins à Abidjan entre mars 2008 et janvier 2015. Il a reçu le soutien des laboratoires Gilead Sciences et Merck Sharp & Dohme Carp sous forme d’un don de médicaments.

 

2056 patients adultes séropositifs pour le VIH-1 ont été inclus. Tous les patients avaient un taux de cellules CD4 inférieur à 800/mm3 et 41% avaient plus de 500 cellules CD4/mm3. Ils ont été répartis aléatoirement dans quatre groupes combinant deux interventions. La moitié des patients recevaient le traitement antirétroviral (ARV) immédiatement quel que soit le nombre de CD4 contrairement à la seconde moitié pour lesquels la prescription d’ARV respectait les critères de l’OMS. Chacun de ces deux groupes se répartissait en deux sous-groupes : la moitié des patients recevaient pendant 6 mois le traitement préventif de la tuberculose par isoniazide (débuté un mois après l’inclusion) et l’autre non. Dans tous les groupes, le traitement ARV de première intention était une trithérapie associant tenofovir/emtricitabine, plus une troisième molécule (efavirenz, zidovudine ou lopinavir/ritonavir).

 

L’étude démontre pour la première fois qu'il existe un réel bénéfice individuel à recevoir des traitements antirétroviraux dès que les CD4 descendent en dessous de  800 cellules/mm3. Dans ce cas, le risque de morbidité sévère (sida, cancer non sida, maladie bactérienne invasive, ou toute maladie conduisant au décès) est diminué de 44% par rapport à ceux recevant le traitement ARV selon les recommandations de l’OMS. De plus, l’étude confirme  que le traitement préventif de la tuberculose initié chez des adultes séropositifs ayant des CD4 élevés diminue le risque de morbidité sévère de 35% par rapport à ceux n’en bénéficiant pas, ceci sans augmenter le risque de résistance. La proportion d’effets indésirables sévères n’était pas significativement différente dans les différentes stratégies.

 

« ANRS Temprano est un de ces essais thérapeutiques majeurs qui jalonnent l'histoire du VIH/Sida. Ces résultats vont surement avoir des conséquences sur la prise en charge des patients vivant dans les pays à ressources limitées », selon le Pr Delfraissy, directeur de l’ANRS.

 

Pour le Pr Serge Eholié (Service des Maladies Infectieuses et Tropicales, CHU de Treichville, Abidjan, Côte d’Ivoire), investigateur principal de l’étude en Côte d’Ivoire, « Ces données, pour être véritablement utiles, doivent s'accompagner d'un renforcement des politiques de dépistage : il faut en effet connaître sa séropositivité pour recevoir un traitement ARV le plus tôt possible. »

 

Abstract

Early ART and IPT in HIV-infected African adults with high CD4 count (Temprano trial)

Christine Danel1, Raoul Moh2, Delphine Gabillard1, Anani Badje4, Jerome Le Carrou1, Gerard M. KOUAME4, Jean Baptiste Ntakpe4, Hervé Ménan3, Serge Eholie2, Xavier Anglaret1

1U897, Inserm, Bordeaux, France; 2Departement des Maladies Infectieuses et Tropicales, Université Felix Houphouet Boigny, Abidjan, Côte d'Ivoire; 3CeDReS, CHU de Treichville, Abidjan, Côte d'Ivoire; 4Programme PACCI, Abidjan, Côte d'Ivoire.

 

 

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               Xavier.anglaret@isped.u-bordeaux2.fr

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